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A, apparences

Extraits

 

 

 

Rimbaud,

 

Tu n'as pas voulu que ta cervelle se fige dans la tiédeur, devienne obéissante ou se morfonde ; Tu soufflais déjà dans des trompettes étranges sous les façades grises. Avec tes mots, tu as repoussé ce qui assiège toute immensité, la tentative de respirer vraiment. Tu as redressé dans nos consciences la nuque de tant de bustes fatigués, pris dans la toile du tâtonnement, entre les pattes de la raideur, des tigres d'acajou.

 

Tu as jeté aux orties les murs, les greniers, les caveaux et les cales tapis entre tes os ; Accroché au croc, dans la fièvre, le piétinnement ; Vendu sa peau pour quelques lieues de plus, quelques rides au delà du miroir ; Jouant aux dés avec tout ce qui nous hante et nous leste, tu as traversé d'autres déserts que l'imposture, l'angoisse et l'importance.

 

Tu as jeté tes vieux godillots à la figure de l'ennui ; Tu as marché sur des braises d'empires, couru sur les eaux parfois troubles mais pleines de possible ; Le vent du boulet n'a même pas emporté un bout de firmament de tes tempes à bout.

 

Appar1

 

Tu as taillé la route, tes crayons de couleur, tu as levé l'ancre... Tu as levé l'encre d'une écriture incorrigiblement lumineuse, extrême et sincère ; Pour t'éloigner peut-être du plomb fondu de la lucidité, tu as déplacé des cratères subtils et envoûtants, des montagnes salées pour étreindre la sagese effrontée.

 

Appar3

 

Tu as couru dans des nuits de Sabbat, des carcans de brasiers autour du cou, trempé ton visage d'ange déchu dans la rosée d'autres puits immaculés au bout de tout.

 

En plein soleil, tu n'étais pas à genou.

 

Tu as trempé ta plume dans l'extrémité impatiente du sens, tes dents de papier dans le bois des radeaux retournés sur les plages encore inconnues de la connaissance ; Les jours sans gouvernail pour garderles yeux grands ouverts.

 

Citoyen du "départ", délivré, tu étais moins étranger loin de ta maison et des "tilleuls verts" ; la parole d'honneur est devenue ta langue ; Tu l'as tirée aussi ; Comme les sonnettes de l'horizon afin d'éveiler le mystère de tes chemins d'exactitudes et de tutoiements.

 

Tu as soulevé des trappes, des draps sans plis, peut-être bien les vagues... ? ...

 

 

Sur d'autres traces qu' Alexandre, tu as conquis une "nonchalance effrénée", la maladresse peut-être, la liberté d'être éperdu ; Tu as usé tes ongles ; Près de tes précipices, tu as aussi joué aux cartes.

 

 

 

 

Si la vie n'est qu'un élan désespéré, nous crevons tous tant de chevaux pour d'inexactes victoires sur nous-mêmes avant de s'éteindre trop tôt dans le linceul du bouillon.

 

Mais il n'est jamais trop tard pour te lire Rimbaud, tes voyelles, tes onomatopées, comme elles ressemblent à la vie, comme un dernier cri ou un dernier signal, tu nous alertes, pauvres humains.

 

 

 

A content ...

E hésitant ...

I joyeux ...

Carpe diem.

 

 

 

A. Garbuio.

 

 

 

Appar4
Appar10

 

Voyelles

 

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,

Je dirai quelque jour vos naissances latentes :

A, noir corset velu des mouches éclatantes

Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

 

Golfe d'ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,

Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ; 

I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles

Dans la colère ou les ivresses pénitentes.

 

U, cycles, vibrements divins des mers virides,

Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides

Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

 

O, suprême clairon plein des strideurs étranges,

Silences traversés des Mondes et des Anges :

- O l' Oméga, rayon violet de Ses Yeux !

 

A. Rimbaud.

 

 

Appar11

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